Mon plan si je devais passer une entrevue pour devenir le vrai DG des Canadiens de Montréal

Ce texte assume que j’aurais une expérience pertinente dans le domaine du hockey, ce qui n’est pas mon cas. J’expose ce point car pour moi un candidat se doit d’avoir de la crédibilité et de la prestance. Ceci dit, même si je n’ai pas ces pré-requis, l’exposé qui suit, peut être d’intérêt au niveau des principes. Ce petit préambule étant fait, voici ma façon de voir les choses et ce que je présenterais comme plan et vision si j’avais le pré-requis de base pour postuler au poste de DG avec les pleins pouvoirs.

Le problème dans le processus de recherche d’un adjoint à Gorton, c’est que les dés sont déjà pipés. Je veux dire par là que ce n’est pas un processus ouvert. Le gars choisi devra cadrer avec ce que Gorton veut comme adjoint. On va encore choisir un gars avec une vision qui cadre avec les manières de faire habituelles de la LNH. Oubliez l’idée d’engager un esprit original et indépendant. On va chercher quelqu’un qui va se mouler à ce qui existe déjà. Gorton a travaillé 25 ans pour des équipes de la LNH. C’est le gars de système par excellence. Ça ne fait pas de lui un incompétent, mais on peut douter que ce soit l’esprit le plus indépendant. Quand on regarde sa feuille de route, on y voit de bons coups et des moins bons, un peu comme Bergevin. Alors que pour moi le critère principal d’embauche devrait être la vision des choses du candidat et son indépendance d’esprit, tout en ayant la crédibilité et la prestance nécessaires pour occuper ce poste. Si l’argument principal du candidat est que le club n’a rien à perdre à l’essayer, comme ce qu’a avancé Patrick Roy après le congédiement de Bergevin, ce n’est pas de cette originalité là dont je parle. Roy aurait la crédibilité et la prestance pour présenter mon plan et occuper l’emploi. Dans son cas c’est autre chose qui pourrait inquiéter et lui nuire.

Si j’étais un candidat crédible au poste de DG du CH, je parle d’un DG avec les pleins pouvoirs, pas un adjoint déguisé, j’arriverais en entrevue avec une analyse détaillée de ce qui fonctionnait dans l’organisation et de ce qui fonctionnait mal. Je dirais que je veux continuer à accumuler un surplus de choix de repêchage à chaque année. Ce serait la base de ma politique de recrutement amateur, avoir plus de chances de tirer vers la cible. Mon deuxième point serait d’avoir un plan pour améliorer mon taux de succès en tirant vers la cible. Mon critère premier serait de toujours prioriser le talent au repêchage par rapport aux autres aspects. Le cas de Joshua Roy en est un flagrant exemple, mais il y en a bien d’autres. Le CH fait déjà cela pas mal depuis 2016, alors je prônerais de continuer dans cette veine. Pour les deux prochaines années, je tenterais d’échanger des vétérans pour des prospects de qualité, ou des choix, tout en gardant quelques vétérans difficilement échangeables pour servir de tuteurs aux plus jeunes. Je favoriserais toutefois, si possible, les prospects bien évalués aux choix de repêchage, histoire d’accélérer mon processus de reconstruction avec certains jeunes joueurs un peu plus âgés.

Une fois la politique de recrutement amateur bien établie. J’engagerais un directeur du recrutement amateur et avec lui je procéderais à une revue des dépisteurs pour chaque régions et j’analyserais la qualité de leurs listes de repêchage pour leurs territoires lors des années passées. Je procèderais par la suite à des changements si nécessaires. Je passerais en revue le processus de suivi des joueurs repêchés et j’offrirais un suivi serré des programmes d’entraînement, de nutrition et d’entraînement spécifique comme le « power skating ». Je me développerais un réseau d’informateurs personnels sur chaque territoires de recrutement. Pas des dépisteurs en tant que tel, mais des personnes bien au fait de ce qui se passe dans chacun de ces territoires, un Stéphane Leroux pour le Québec, par exemple. Ce n’est qu’un exemple pour illustrer le type de personne, soit quelqu’un bien au fait de ce qui se passe sur un territoire donné. Ce réseau serait confidentiel et ces personnes ne se rapporteraient qu’à moi. Je mettrais aussi sur pied un réseau de dépisteurs vidéos dédiés à certains territoires. Ce réseau serait distinct de mon département de recrutement sur le terrain. Les informations que je recevrais de ces trois réseaux distincts me permettraient de demander des informations précises à mes dépisteurs et de donner des mandats de suivi sur des joueurs en particulier. Ces trois réseaux me permettraient de faire des croisements de données et d’informations. Deux sources venant du terrain, et la source vidéo qui aurait l’avantage d’un plus grand échantillon de matchs visionnés. Je pourrais aussi demander à mes dépisteurs vidéo des rapports avec montage de séquences pertinentes que je pourrais visionner, avec argumentaire du dépisteur vidéo à l’appui des séquences choisies. Bien sûr il faudrait faire le tri de toute cette information et être prudent au début, mais à la longue la compétence des dépisteurs sur le terrain et des dépisteurs vidéo pourrait être validée ou infirmée par les résultats, même chose pour les informateurs. Je n’hésiterais pas à payer pour pouvoir engager les meilleurs dépisteurs.

Pour ce qui est du Rocket de Laval, je tenterais de faire en sorte que le club soit un club gagnant. Ça me semble important pour favoriser le développement. Le coach serait choisi en fonction de pouvoir devenir entraîneur chef du grand club un jour. Par exemple, Joel Bouchard aurait cadré avec ma philosophie, mais pas Jean-François Houle qui n’a aucune chance de devenir entraîneur chef du CH un jour. Le club école aurait un entraîneur spécialisé dans l’amélioration du coup de patin, car la faiblesse de plusieurs joueurs de la AHL est justement le coup de patin. Ce serait un point important en plus de tout le reste.

Pour ce qui est du grand club et du recrutement professionnel. Il me faudrait un directeur qui bien sûr partage mon approche et ma vision. Là aussi j’aurais des dépisteurs vidéos dédiés. Deux qui couvriraient la AHL en regardant beaucoup de matchs de toutes les équipes. Au niveau de la LNH, j’aurais quatre dépisteurs vidéos qui couvriraient chaque division et regarderaient chaque match de chaque club et qui produiraient des rapports périodiques sur chaque équipe, avec des joueurs d’intérêts pour des échanges potentiels. Bien sûr, j’aurais un dépisteur par division sur le terrain pour voir des matchs en personne et ramasser de l’information de première main sur la situation de chaque équipe. Là aussi je pourrais croiser l’information des recruteurs de terrain et de ceux vidéos. L’avantage des recruteurs de terrain est bien sûr de voir des matchs sur place et accumuler de l’information de première main, par exemple, savoir pourquoi certains joueurs jouent moins, conflits à l’interne, avec le coach, ce genre de choses. Alors que les recruteurs vidéos, eux, ont l’avantage de voir tous les matchs. Pour le DG, le croisement de cette information permet de voir les convergences et les divergences et de donner des mandats précis à propos de certains joueurs d’intérêt. Si un joueur d’intérêt, bien coté par mes dépisteurs, sous-performe, je dois comprendre pourquoi si jamais je veux tenter de l’acquérir.

Le département de recrutement professionnel est bien entendu crucial pour aider le DG à prendre de bonnes décisions pour effectuer des transactions, réclamer des joueurs au ballottage, et offrir des contrats à des agents libres. Le département de recrutement amateur a aussi un rôle pour élaborer certaines transactions ou des choix et des prospects sont inclus. Avec toute cette information, la prise de décision pour les échanges et les offres de contrats (à des joueurs du club ou des agents libres), serait faite de la façon la plus objective possible et en offrant un contrat en se basant strictement sur ce qu’on pense qu’un joueur peut encore offrir sur la glace durant la durée d’un éventuel nouveau contrat. Il serait strictement proscrit de bonifier une offre pour des raisons émotives et d’attachement personnel au joueur concerné, pour services rendus et choses du genre. Toutes les décisions seraient prises en se basant sur l’évaluation de ce qu’un joueur pourra donner sur la durée d’un éventuel contrat offert. L’approche serait de toujours tenter d’obtenir la meilleure valeur pour la portion de la masse salariale investie.

Il n’y aurait pas de joueurs intouchables. En cas de négociations difficiles avec un joueur gourmand, une évaluation de sa valeur d’échange serait faite à chaque fois, et si l’échange semble plus favorable, en tenant toujours compte du plafond salarial, le joueur serait échangé, à moins qu’au final il n’accepte un contrat qui cadre avec l’évaluation que l’équipe fait de lui et de la situation salariale du club. Si j’étais DG, ma politique générale serait d’identifier les joueurs avec un potentiel à long terme pour l’équipe le plus tôt possible et de les mettre sous contrat à long terme dès ce moment. Cela permet en général d’obtenir un meilleur rapport qualité/prix. Les contrats de Pacioretty et Gallagher au début du mandat de Bergevin étaient de bons exemple de réussites en ce sens. Le gestion de Subban et Danault furent des exemples de mauvaises gestion de cas similaires. Même si on avait fini quand même par échanger Subban, celui-ci aurait eu une bien meilleure valeur d’échange à 6 M$ par année qu’à 9 M$ par année. Puis si on avait offert un contrat à long terme à Danault il y a trois ans, au lieu d’un contrat pont, il serait encore avec le club à environ 4.75 M$ par année pour encore quatre ou cinq ans et là aussi sa valeur d’échange serait supérieure à ce qu’elle est pour les Kings actuellement avec un Danault à 6 M$ par année.

En complément à mon personnel de recrutement amateur et professionnel, j’aurais aussi un un petit groupe d’analyse en statistiques avancées qui partagerait ses données avec tous les dépisteurs de l’organisation selon leurs territoires. Cela viendrait en appui à l’appréciation visuelle et pourrait orienter les dépisteurs sur certains aspects à observer en particulier chez certains joueurs. Aussi, à partir des archives du club, j’ordonnerais une rétro analyse des repêchages du club lors des 20 dernières années. Les listes finales de repêchage de l’équipe seraient analysées et comparées aux rapports de dépistage de chaque joueur sur ces listes, tout cela à la lumière des résultats réels de chacun de ces joueurs au cours de leur carrière par la suite. Le but serait de comprendre le plus possible la source des erreurs, et la source des bonnes évaluations et d’ajuster les critères d’évaluation courants des jeunes joueurs. Le but serait de détecter des tendances car les erreurs sont inévitables en évaluant des joueurs de 17-18 ans.

Certains pourraient critiquer mon plan en disant que ça ferait bien du personnel à engager, que ça coûterait cher et qu’il serait difficile de démêler tant d’information. C’est vrai, mais dans une ligue à plafond salarial ferme, l’avantage des clubs riches est de pouvoir dépenser plus. Aussi, avec tous ces dépisteurs sur le terrain, dépisteurs vidéos et informateurs, on pourrait dire qu’il y aurait trop d’informations qui remonteraient vers le DG et qu’à lui seul il ne pourrait traiter toute cette information. C’est vrai, et c’est pourquoi je m’entourerais de deux bons adjoints, qui partagent ma façon de voir les choses, pour pouvoir m’aider à bien traiter toute cette information. Bien sûr, un tel plan ne pourrait être mis en place du jour au lendemain, et ce serait un processus évolutif et dynamique. Un rôle important du DG serait de bien identifier, à l’embauche, le talent dans son personnel de dépisteurs et de directeurs, mais aussi par la suite, lorsque nécessaire. Le DG devrait pouvoir identifier et corriger ses erreurs d’embauche rapidement dans son personnel hockey car c’est la base pour ultimement prendre les meilleures décisions concernant les joueurs. Un tel plan ne s’établirait pas en un jour, mais ce serait l’inverse d’un « boys club ». Ce serait une méritocratie basée sur une solide éthique de travail ou la rigueur et la rationalisme régneraient.