Le moins qu’on puisse dire c’est que les Canadiens sont actuellement dans le creux de leur processus de reconstruction, si on s’en tient au moral des partisans. Selon moi, la reconstruction va bien, et il y a plusieurs signes encourageants, mais à cause du contexte d’une autre saison déraillée par les blessures, le partisan moyen est tanné de regarder son club piétiner dans les bas-fonds de la ligue.
Pourtant, à mon avis, l’organisation a fait des progrès importants cette saison, mais ils sont masqués par les blessures qui ont fait monter le nombre de défaites. Le point positif le plus important est l’émergence très notable de Juraj Slafkovsky. Le jeune a survécu à une promotion trop hâtive dans la LNH, et depuis 29 matchs il est en pleine éclosion, une éclosion surprenante tellement elle est rapide. Slafkovsky a accumulé 23 points à ses 29 derniers matchs et il semble loin d’avoir atteint son plein potentiel tout juste avant de conclure sa 20e année sur cette planète. Il y a encore beaucoup de déchets dans son jeu, de manque de constance, mais depuis 29 matchs il arrive à faire fi de cela pour quand même obtenir de très bons résultats en terme statistique.
Il semble pleinement justifier son statut de premier choix au total en 2022, et une grande partie du mérite lui revient. J’ai tendance à toujours donner le gros du mérite au joueur, qu’il devienne un joueur étoile, ou bien du blâme s’il se révèle un flop. Malgré les nombreux doutes que j’ai exprimés ici sur Slaf, et surtout sur sa promotion trop rapide, je suis heureux de voir qu’il semble se diriger vers de grands accomplissements. C’était primordial pour le succès de cette reconstruction, et même si j’ai souvent douté sur sa promotion et même sur son potentiel ultime, une partie du mérite revient aussi à Hugues, Gorton, Lapointe, Bobrov et aux dépisteurs qui les conseillent. Il faut reconnaître le bon travail, surtout en ce qui concerne une décision si importante. Slaf n’a pas eu à forcer la main de la direction pour être promu avec le grand club, au contraire, il a eu droit à un traitement de faveur, mais le crédit lui revient de ne pas s’être comporté en parvenu. Le jeune a travaillé, il semble un jeune joueur passionné, et encore une fois, le gros du crédit lui revient. Ceci dit, il devra bien sûr confirmer cette émergence spontanée dans la durée.
Autrement, l’organisation a aussi ajouté un défenseur top-4 cette saison en Jayden Struble. Celui-ci n’accumulera jamais de stats offensive faramineuses mais c’est le genre de joueur qu’un club aspirant à la coupe doit posséder. Struble vient compléter le côté gauche de la défense montréalaise qui comptait déjà Matheson et Guhle. Si un des trois doit partir d’ici l’été 2025, ce ne sera pas Struble, et ce pour toutes sortes de raisons, dont ses qualités supérieures en défensive et ce qu’il coûtera sur la masse salariale à long terme. Matheson et Guhle, eux, montrent des profils de joueurs plus similaires et si un autre jeune s’impose, à terme, selon moi ce sera un de ces deux joueurs qui sera sacrifié pour aller chercher du renfort à l’attaque.
Bien sûr, le problème le plus important demeure à l’avant, mais l’absence de Dach a tellement changé la donne cette saison, sans compter Newhook et Harvey-Pinard qui ont aussi manqué beaucoup de matchs. La fragilité des joueurs demeure un problème. Ceci dit, si on veut voir les choses avec optimisme, il faut se raccrocher à l’idée que le club a la capital d’actifs nécessaire pour améliorer l’attaque assez rapidement. Hughes devra être à la manœuvre pour que cela se concrétise et il devra éviter de surpayer, mais il aura un autre choix top-5, ainsi que de nombreux autres très bons choix au cours des deux prochains repêchages, tout cela sans compter un pipeline avec de la profondeur.
Hughes a de quoi travailler en évitant un geste inconsidéré. Il doit éviter le piège dans lequel sont tombés les Sénateurs et les Sabres en tentant d’accélérer leur processus de reconstruction. Hughes aura aussi l’espace salarial pour ajouter un ou deux agents libres surpayés sur des contrats d’une année ou deux. Le genre de vétérans qui viendraient donner du temps et de la profondeur pour la saison prochaine, et peut-être la suivante. Cela permettrait de laisser maturer des jeunes à Laval, ça apporterait de l’expérience, et selon les circonstances ces joueurs pourraient être échangés la date limite. Quand je dis des agents libres surpayés, c’est dans l’optique de les avoir sur un contrat d’un an ou deux au maximum. Alors tu paies plus par année, mais tu ne donnes pas beaucoup d’années. Une alternative à ce genre de joueur autonome est d’acquérir des vétérans surpayés avec une année ou deux de contrat restantes venant de clubs qui doivent libérer du salaire. Un peu comme l’échange Monahan, et le CH pourrait en plus obtenir des choix pour prendre ces joueurs.
Il y a plusieurs options ouvertes pour Hughes, comme de conclure un autre échange du type Dach et Newhook. Il faut aussi se rappeler que des jeunes joueurs peuvent surprendre au travers de tout cela, comme Struble cette année, même si pour moi ce n’était pas une surprise, ou bien Slaf qui a progressé de manière subite et marquée. Qui nous dit qu’un gars comme Roy, qui n’aura 21 ans qu’en août prochain, ne fera pas un bond en avant significatif. Il montre des éclairs de ce potentiel, mais il est mal entouré actuellement. Que pourrait-il faire avec Dach comme joueur de centre la saison prochaine? Ce n’est qu’un exemple. Où en seront Mailloux et Reinbacher en octobre prochain? Voilà. Les partisans et les médias sont sur la déprime, mais si on regarde un peu plus loin, il y a de la place pour l’optimisme. Une reconstruction en bonne et due forme ça prend du temps.